Théorie de l’esprit : qu’est-ce que c’est, comment l’évaluer et quelques activités pour l’améliorer

Vous êtes-vous déjà imaginé comment serait votre vie si vous ne pouviez pas devinez ou imaginez les intentions et les pensées des autres ? La capacité qui nous permet de prendre en compte des aspects comme celui-ci est connue comme “La théorie de l’esprit”. Cependant, il existe certains troubles dans lesquels cette capacité humaine est affectée. Que se passerait-il si vous n’étiez pas capable de supposer ou d’imaginer ce que les autres pensent ? Rocío Gracía Tribaldo, psychologue, répond à nos questions et nous recommande un test ainsi que des activités intéressantes afin de travailler notre théorie de l’esprit.

Théorie de l'esprit

Théorie de l’esprit : qu’est-ce que c’est et comment l’augmenter

 

Dans cet article nous vous expliquons qu’est-ce que la théorie de l’esprit, comment celle-ci se développe et comme elle est liée aux troubles du spectre autistique (TSA). Finalement, nous vous donnerons des outils afin de détecter les difficultés dans le développement de la théorie de l’esprit, et nous vous aiderons à travailler cette habileté chez vous.

Théorie de l’esprit : qu’est-ce que c’est et comment se développe-t-elle ?

Le concept de la théorie de l’esprit fut utilisé pour la première fois par Premack et Woodruff en 1978 pour expliquer le comportement d’un chimpanzé en réalisant une série d’expériences dans lesquelles on lui présente différentes situations problématiques avec chaque fois deux solutions alternatives (une correcte et une incorrecte). Finalement, la conclusion de ces expériences fut que le chimpanzé est capable de résoudre des situations problématiques car il est capable d’identifier le problème ainsi que le désir des chercheurs qu’il le résolve, c’est à dire que le chimpanzé est capable d’attribuer un état mental, ou un désir, aux chercheurs. Afin de décrire cela, ils ont utilisé le concept de la théorie de l’esprit :

“En disant qu’un sujet possède une théorie de l’esprit, nous voulons dire que le sujet est capable d’attribuer des états mentaux à lui-même et aux autres… Un système d’inférences de ce type est considéré, dans un sens strict, une théorie : premièrement parce que de tels états ne sont pas directement observables, et deuxièmement parce que le système peut être utilisé pour faire des prédictions d’une manière spécifique du comportement d’un autre organisme (…)” Premack et Woodfruff, 1978 (p. 515-526).

Par exemple, si nous sommes en train de parler avec un groupe de personnes, et que soudain l’une d’entre elles se lève et s’en va, nous essayons automatiquement de comprendre son comportement (celui que nous observons). Pour cela, nous sommes capables de déduire que celui-ci peut être dû à un état mental (par exemple, mes commentaires ne lui ont pas plu), pour une croyance (par exemple, il croit que nous avons terminé) ou pour parce qu’il a d’autres plans. En définitive, nous sommes en train de réaliser une espèce de théorie de l’esprit en déduisant les états mentaux ou les croyances qui pourraient expliquer ce comportement.

Le développement de la théorie de l’esprit se produit entre les trois et les cinq ans de vie, bien qu’il continu de se perfectionner pendant les années qui suivent. Lorsqu’un enfant “découvre la théorie de l’esprit”, il est capable de prendre conscience du fait que les gens (lui compris) ont des états mentaux, des désirs, des émotions, des croyances, des intentions qui leurs sont propres, et que ceux-ci sont capables de guider leurs comportements.

Lors des dernières années, le concept de la théorie de l’esprit a acquis une grande importance dans l’investigation et dans la pratique clinique, surtout dans les domaines liés au développement et aux troubles du spectre autistique (TSA).

Théorie de l’esprit et troubles du spectre autistique (TSA)

Les troubles du spectre autistique (qui comprend par exemple le syndrome d’Asperger) sont principalement caractérisés par l’altération de :

  • Relations sociales (théorie de l’esprit, difficultés à comprendre les émotions des autres, manque d’empathie, problèmes de communication)
  • Développement du langage (voir absence de langage et des gestes de compensation dans certains cas)
  • Communication (problèmes pour commencer une conversation, problème de l’intonation des mots, etc…)
  • Imaginer

En nous concentrant sur les implications d’un déficit dans la théorie de l’esprit chez un enfant, nous pouvons souligner (Baron Cohen, 1999) :

  • Manque de sensibilité envers les sentiments des autres.
  • Incapacité de prendre en compte une information que les autres savent.
  • Incapacité de détecter le degré d’intérêt que les autres montrent sur ce qu’il est en train de dire.
  • Difficultés à détecter l’ironie ou le sens figuré.
  • Incapacité d’anticiper ce que les autres peuvent penser de son comportement.
  • Incapacité de prendre en compte les malentendus.
  • Incapacité de comprendre la tromperie et de tromper.
  • Incapacité de comprendre les raisons qui poussent les autres à avoir un comportement déterminé.

Tous ces déficits vont rendre plus difficile l’adaptation de l’enfant à son environnement, ainsi qu’il est d’une grande importance de donner à l’enfant les outils nécessaires afin qu’il puisse s’adapter à son environnement de la manière la plus adaptée possible. Dans le dernier chapitre, nous verrons quelques techniques qui permettent de développer et d’améliorer la théorie de l’esprit à la maison.

Dans le chapitre suivant, nous allons aborder une méthode qui vous permettra d’obtenir des indices de difficultés du développement de la théorie de l’esprit d’une manière facile et rapide.

Test de Sally et Anne afin de détecter les difficultés de la théorie de l’esprit chez les enfants

Comme nous l’avons mentionné dans les chapitres précédents, la théorie de l’esprit est une habileté qui commence à se développer vers les trois ans.

Il existe un test, appelé test de Anne et Sally, qui nous permet de détecter si quelque chose va mal dans le développement de la théorie de l’esprit chez un enfant.

En général, il est normal qu’un enfant de trois ans ne réponde pas correctement aux questions de ce test, mais dès l’âge de quatre ans, l’enfant devrait être capable de répondre sans difficultés.

Pour réaliser ce test, vous n’avez pas besoins d’être un professionnel, car il vous suffit de suivre une méthodologie assez simple. De plus, pour réaliser cette expérience, vous n’aurez besoin que de deux poupées, deux boîtes différentes et une balle.

Afin de réaliser ce test, vous devez mettre en place une espèce de théâtre, dont les personnages seront Anne et Sally (les deux poupées). Chacune a une des boîtes que nous avons citées auparavant. L’histoire que vous devez représenter et narrer est la suivante :

Sally et Anne ont une caisse chacune. Sally range une balle dans sa boîte avant de quitter la scène (nous mettons la balle dans la boîte de Sally). Une fois que Sally est sortie de la scène, Anne change la balle de boîte et la met dans la sienne, sans que Sally ne soit au courant. Ensuite, Sally revient sur la scène et nous demandons à l’enfant : où est-ce que Sally va chercher la balle qui était dans sa boîte ?

Un enfant qui développe correctement sa théorie de l’esprit répondra que Sally cherchera la balle dans sa boîte parce qu’elle n’a pas vue Anne changer la balle de place.

Par contre, un enfant qui présente un trouble du spectre autistique dira que Sally cherchera la balle dans la boîte d’Anne, parce qu’il ne comprend comment Sally peut encore penser que la balle se trouve où elle l’a laissée (il ne comprend pas que les actions de Sally sont basées sur sa croyances erronées). En définitive, un enfant qui présente un trouble du spectre autistique aura de la peine à comprendre que les autres ont leurs propres pensées et croyances (états mentaux) qui peuvent être différents des siens, et même différents de la réalité.

Comme vous pouvez le voir, il s’agit d’un test simple à réaliser, mais l’information que l’on peut en retirer est très significative.

Si vous détectez un problème lors de ce test il est alors nécessaire de faire appel à un spécialiste. Car si l’enfant présente des difficultés pour réaliser le test de Anne et Sally, il aura également des difficultés pour s’adapter à son environnement d’une manière efficace, ce qui lui posera des problèmes.

Pour terminer, voici quelques techniques afin que vous puissiez aider un enfant autiste à améliorer sa théorie de l’esprit à la maison.

Techniques pour travailler la théorie de l’esprit chez les enfants qui présentent un trouble du spectre autistique

Malgré que vous connaissiez certainement la majorité de ces techniques si vous avez un enfant qui souffre d’un trouble du spectre autistique, cela est important de citer les techniques les plus importantes et les plus efficaces.

  1. ARASAAC : Sur cette page internet vous pourrez télécharger gratuitement un grand nombre de techniques et d’activités afin de travailler la théorie de l’esprit. De plus, il y a également beaucoup d’autres activités destinées à travailler sur différents aspects liés aux difficultés que rencontrent les enfants qui présentent un trouble d spectre autistique.
  2. Manuel de la théorie de l’esprit pour les enfants autistes : ce livre contient tout un ensemble de fiches, de techniques et de travaux à réaliser avec un enfant, et est accessible pur tout le monde, autant pour les professionnels que pour les parents.
  3. Enfin, nous vous recommandons de réaliser différentes activités en simulant des situations. Voici quelques exemples qui peuvent vous servir de guide, et qui peuvent vous aider à créer différentes activités similaires :
    1. Nous préparons une photo de l’enfant et une photo de nous-mêmes.
    2. Sur une feuille de papier, nous écrivons les questions suivantes : “Qu’est-ce qui te plait ? Qu’est-ce qui t’intéresse ? Qu’est-ce qui te dérange ?”.
    3. Nous commençons avec la première question, à laquelle vous répondez tous les deux par écrit.
    4. Ensuite, nous choisissons les pictogrammes qui correspondent chaque chose citée auparavant et nous demandons à l’enfant qu’il dispose chaque pictogramme avec les goûts et les intérêts de chacun.

Avec ce type d’activités, nous allons encourager l’amélioration des habiletés sociales de l’enfant et lui permettre de comprendre que les intérêts et les goûts de chacun sont différents, et qu’ils ne sont pas forcément égale aux siens. C’est à dire que nous allons l’aider à comprendre les états mentaux des autres et luis faire comprendre que ceux-ci peuvent être différents des siens.

Merci beaucoup de nous avoir lu, nous espérons que cet article vous aura plus et surtout qu’il vous aura été utile. N’hésitez pas à laisser vos commentaires et vos questions plus bas, nous serons enchantés d’y répondre. 🙂

“Source : Rocío Gracía Tribaldo, psychologue de CogniFit spécialisée en psychologie positive.”