La douleur, amie plutôt qu’ennemie
Elle est là depuis notre premier cri dans ce monde, elle nous a accompagné tout au long de notre vie. Au début, elle ne représentait rien, on avait le sens de l’aventure, on fonçait tête baissée, mais au fur et au mesure, on a appris à l’éviter, à avoir plus ou moins peur qu’elle nous tienne, cette douleur inévitable.
La douleur est une notion vaste, elle change de définition et de critère d’une personne à l’autre. Ma douleur n’est peut-être pas la même que celle d’une personne qui souffre de la même chose que moi, elle est subjective et propre à l’individu.
Bien qu’elle soit désagréable, elle est essentielle à notre survie, c’est un mal pour un bien. Elle est là pour alerter, informer, raconter…
Avez-vous déjà eu mal ? Souriez votre corps se bat pour vous !
La douleur, c’est quoi ?
Selon LASP (l’association internationale pour l’étude de la douleur), la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite dans ces termes.
Effectivement, c’est est un système d’alarme pour remettre en cause notre intégrité physique.
Quand on se blesse, on a mal au niveau de cet endroit précis, et on a l’impression que de cette partie du corps là que vient le problème. En réalité, c’est encore plus compliqué que ça.
C’est tout un système, et il n’est pas là pour nous faire souffrir, mais pour alarmer qu’il y a une anomalie quelque part ou un danger afin de nous protéger.
La douleur, comment est-ce qu’on la ressent ?
D’une façon générale, ce circuit se résume au fait que la douleur est perçue grâce aux récepteurs à terminaisons libres passe à travers les fibres nerveuses vers la moelle épinière, puis le cerveau.
La plupart du temps on croit qu’elle n’a qu’un seul circuit, de la région atteinte jusqu’au cerveau, mais en réalité, c’est une multitude de messages et d’échange entre la partie affecté, la moelle épinière et le cerveau.
Effectivement, on a deux voies qui véhiculent cette douleur, ascendante et descendante. Et la perception de celle-ci se fait en 6 étapes :
1. Transduction :
La douleur prend naissance dans les nocicepteurs ou ce qu’on appelle les récepteurs périphériques. ces derniers sont dispersés dans tout le corps nous permettent de ressentir les stimuli externes et internes.
Ces nocicepteurs convertissent les stimuli d’un message mécanique à un courant électrique : C’est ce qu’on appelle la transduction sensorielle.
2. La conduction :
C’est la transmission de flux nerveux à travers les fibres nerveuses qui se trouvent dans le ganglion spinal de la moelle épinière, pour finir dans la région externe de la corne dorsale de cette dernière.
En ce qui concerne la douleur, on a deux types de fibres :
Les fibres groupe III avec une vitesse de 5 à 30 m/s.
Les fibres groupe IV sont les plus lentes avec une vitesse de 0,5 à 2m/s.
La sensibilité à la douleur peut se faire en deux temps : Une sensation qui arrive rapidement par le groupe III et une sensation beaucoup plus lente qui passe par le groupe IV. C’est pourquoi la moelle épinière intervient avant que le cerveau reçoive l’information.
Exemple : Quand on touche un objet brûlant, dans un premier temps on a tendance à retirer la main avant que l’information n’arrive au cerveau, c’est la moelle épinière qui reçoit la réponse rapidement grâce au groupe III, et dans un deuxième temps, on commence à avoir mal après l’acte, suite au flux nerveux qui arrive enfin au cerveau non seulement au groupe III mais aussi groupe IV.
3. Transmission :
Au niveau de la région externe de la corne postérieure de la moelle épinière, le flux nerveux génère la libération des neurotransmetteurs responsables de la transmission d’informations au niveau des synapses.
L’intensité de la douleur dépend de la libération des neuropeptides, dont la substance P, qui est libérée par les terminaisons des fibres nociceptives et se fixent sur les récepteurs. Cette substance P génère une réponse postsynaptique et améliore l’activité des récepteurs NMDA. Ces derniers sont responsables de l’entrée de calcium qui nous informe sur les modifications de l’intensité de la force de transmission synaptique.
4. Perception :
Ainsi, le signal passe par les voies ascendantes vers le cerveau qui percevra la douleur.
5. La modulation :
Quand la douleur fait son trajet, elle fait l’objet de diverses modulations grâce à un système régulateur qui l’intensifie ou la diminue.
Exemple : Parfois on a mal suite à une petite coupure quelque part au niveau du corps, mais on ne se souvient pas quand est-ce qu’on a pu se blesser. C’est parce que la sensation a été amortie sur le coup. Alors que parfois, on a très mal suite à une toute petite blessure, c’est à cause de ce signal qui a été intensifié.
Au niveau de la voie ascendante : C’est une modulation facilitatrice de la moelle épinière au cerveau qui permet à ce dernier de supporter cette douleur.
Au niveau de la voie descendante : C’est une modulation inhibitrice du cerveau à la moelle épinière, pour rendre la sensation plus supportable.
Ce contrôle est possible grâce à la corne dorsale de la moelle épinière ainsi que les projections neuronales.
Cependant, plus le cerveau aura l’impression que le corps est en danger et plus on aura mal, autrement dit, la modulation inhibitrice sera moins efficace.
6. Traitement :
Une fois dans le cerveau, les messages nociceptifs arrivés à des moments différents, sont analysés par différentes zones.
Effectivement, une fois arrivés au thalamus, le message est envoyé à plusieurs endroits.
- Pour les stimuli non douloureux, l’information est envoyée au cortex somatosensoriel en passant par le noyau ventral postérolatéral.
- Pour les stimuli douloureux, l’information traverse la partie médiane du thalamus jusqu’à l’aire corticale motrice, responsable des réactions motrices à adopter suite à la douleur.
- Enfin, un troisième chemin peut être emprunté par l’information, du noyau intra laminaires du thalamus jusqu’aux régions du système limbique responsable des émotions à adopter suite à une douleur.
La douleur, deux catégories
Il y a deux catégories de douleur : Aigüe et chronique
La douleur aigüe : Est une douleur qui surgit à un moment précis, elle peut durer des secondes, des minutes, des jours ou des semaines. Elle est là parce qu’il y a une cause connue ou pas et elle
disparaît une fois la cause disparue, autrement dit, après la guérison.
Exemple :
Quand vous vous cognez le petit doigt contre le coin d’un meuble. La douleur que vous ressentez est aigüe, parce qu’elle ne va durer que quelques instants ou dans les cas extrêmes quelques jours.
La douleur chronique : Est une douleur qui s’est installée et qui est restée plus de 3 mois. Elle est compliquée parce qu’elle ne disparaît pas, même après un traitement. Elle perdure sur le long terme dans la vie de la personne atteinte et la perturbe.
Exemple :
Si vous avez mal au ventre, ça peut se soigner en quelques jours, mais si hormis la prise des médicaments, ça perdure plus de 3 mois, elle devient chronique.
Une douleur aiguë est susceptible de devenir chronique si elle n’est pas traitée.
La douleur, plusieurs formes
– Nociceptive :
C’est une douleur perçue par des nocicepteurs suite à une lésion au niveau du corps, c’est le type le plus fréquent, et peut être aigüe ou chronique.
Les nocicepteurs qui sont responsables de la réception de cette douleur, véhiculent l’information à travers la voie ascendante, et sont présents dans la peau, les os, les muscles, la plupart des organes internes, les vaisseaux sanguins, le cœur, etc.
Exemple : Quand une personne se brûle le doigt, cette brûlure est ressentie grâce aux récepteurs cutanés qui véhiculent l’information jusqu’au cerveau, et ce dernier la traduit comme une douleur.
– Neuropathiques :
Une douleur est neuropathique quand elle est liée au système nerveux (central + périphérique), elle est due à une lésion ou un dysfonctionnement de ce dernier.
Au niveau du système nerveux central, elle peut être dû à de nombreux facteurs, comme un AVC (accident vasculaire cérébral) ou à une tumeur au niveau du cerveau ou de la moelle épinière, etc. Et au niveau du système nerveux périphérique, elle touche les nerfs en dehors de la moelle épinière et du cerveau, par exemple, le syndrome du tunnel carpien qui cause une douleur au niveau des nerfs au niveau du poignet.
Elle est généralement chronique, car les nerfs peuvent garder en mémoire la douleur et la retranscrire même après un traitement, qu’il soit médical, chirurgical, non médicamenteux…
Exemple : Le syndrome du canal carpien qui cause une douleur au niveau des doigts de la main, cette maladie est liée à une compression du nerf médian du poignet.
– Psychogène :
C’est une douleur au niveau psychologique, et peut aussi être chronique ou aigüe.
Par contre, une douleur psychogène aigüe est rarement prise en compte, bien sûr, personne ne va chez le psychologue, car ça fait deux jours qu’il ne se sent pas bien, ça peut être normale. Cependant, ça devient pathogène quand la sensation perdure sur le long terme et commence à affecter la routine de la personne.
Ce qui rend ce type de douleur spécial, c’est qu’ils ne sont pas causés par une maladie ou un stimulus précis, mais attention, même si elles n’ont pas de causes, ça ne veut pas dire qu’ils n’existent pas. Au contraire, elles peuvent être plus douloureuse que les douleurs nociceptives et neuropathies, car elles peuvent nous faire entrer dans un cercle vicieux.
Exemple : Si je me cogne la tête contre un mur, je ressentirai la douleur car elle a été captée par les récepteurs, mais dans quelques minutes, le cerveau ne recevra plus l’information, et la douleur s’estompera. Alors que dans la douleur psychologique, on peut ressentir une douleur au niveau du dos par exemple, va nous pousser à penser qu’à ça, ce qui va faire croire à notre cerveau que c’est une douleur plus importante, ce qui va augmenter cette sensation, qui va encore une fois envoyer l’information au cerveau et ainsi de suite. C’est ainsi qu’on alimente notre douleur, et le meilleur de tout ça, c’est qu’on en n’est même pas conscient.
Le traitement de ce genre de douleur est compliqué, et nécessite un traitement spécifique chez un psychiatre ou un psychologue.
Le décalage entre cerveau et moelle épinière
Parfois, le corps ne peut pas attendre que le flux nerveux soit arrivé jusqu’au cerveau pour réagir, c’est pourquoi il se tourne vers la moelle épinière qui prend la décision à sa place.
Reprenons notre exemple de la brûlure, avant d’avoir ressenti la douleur, vous avez certainement eu le réflexe de retirer le doigt avant, cependant, ce n’est pas votre cerveau qui a donné cet ordre, mais c’est la moelle épinière.
Effectivement, cette dernière a envoyé un flux nerveux par voie descendantes qui a fait en sorte que le doigt soit retiré car elle a reçu l’information bien avant le cerveau. Une fois ce dernier informé, il s’occupe de générer la sensation de la douleur suite à ce contact et la réaction à avoir suite à cet événement.
La douleur : Comment notre corps se défend-il contre elle ?
Notre corps n’est pas idiot, il ne va pas se laisser faire comme ça, si le cerveau génère une douleur qui nous perturbe, il va aussi génère des antidouleurs qui arrêteront le malaise que nous ressentions.
Parmi ces antidouleurs, on trouve :
L’ocytocine : cette hormone qui cible les neurones périphériques est sécrétée par l’hypothalamus, elle module les régions responsables de la sensation de la douleur. Si elle n’avait pas été présente, ce coup de marteau que vous auriez reçu sur le doigt aurait été beaucoup plus douloureux.
Enképhaline : C’est une molécule qui fonctionne comme antalgique à brève durée (quelques minutes) sur les voies et centres de la douleur
Endorphine : C’est une hormone sécrétée par l’hypophyse et l’hypothalamus et présente dans le cerveau ainsi que la moelle épinière, elle agit comme la morphine, en se plaçant sur les récepteurs morphiniques et procure une sensation de relaxation de bien-être. Cette hormone est utilisée comme un médicament antalgique.
L’adrénaline : Est une hormone produite au niveau des glandes surrénales en cas de stress aiguë ou d’un événement excitateur (traumatisme, joie…). En ce qui concerne la douleur, l’adrénaline fait diminuer la sensation de cette dernière dans le corps, et cela pour une période précise qui peut aller de quelques minutes jusqu’à des heures.
L’insensibilité congénitale à la douleur
La maladie d’insensibilité congénitale à la douleur est une maladie rare est très grave qui apparaît dès le jeune âge, elle se caractérise par l’incapacité à sentir la douleur, quelle que soit sa gravité ou sa localisation dans le corps.
Les personnes atteintes de cette pathologie, arrivent à sentir la différence entre les différentes sensations (froid, chaud…) mais n’arrive pas à sentir la douleur que les éléments peuvent engendrer.
Exemple : En cas de brûlure, ces personnes peuvent ressentir qu’il y a de la chaleur, mais n’auront pas mal.
Ça peut sembler très plaisant, et vous pouvez même envier ces personnes, mais laissez-moi vous dire, que ce n’est pas une bénédiction. Ces patients atteints de cette maladie ne peuvent pas sentir si leur corps va bien ou pas. Par exemple, en cas d’infection alimentaire, vous allez sentir à un moment, une douleur au niveau de votre ventre, vous saurez qu’il y a un problème et vous irez voir un médecin, alors que chez ces personnes, elles ne pourront jamais le savoir, et donc, laisseront la maladie s’aggraver.
Cette maladie peut avoir certaines conséquences comme :
- Déformation des articulations.
- Recours parfois à l’automutilation pour comprendre leur corps.
- La mastication peut entraîner des blessures au niveaux des lèvres et de la langue.
- Un retard intellectuel
Malheureusement, il n’y a pas vraiment de traitement, la seule manière est la prévention : en faisant des visites médicales complète aussi souvent que possible.
Vous devez savoir que la douleur est nécessaire dans notre vie, elle n’est pas contre vous, mais AVEC vous.
Lors d’un accident, la première chose qu’un médecin ou un secouriste ferait, sera de vérifier si vous avez une blessure dans votre corps. Il ne va pas se fier à ce que vous dites, car en état de choc, notre corps produit une grande quantité d’adrénaline, ce qui fait que vous pouvez ne pas sentir la douleur. Donc, imaginez si c’était le cas tout le temps, vous pourriez avoir un arrêt cardiaque et vous ne le sentirez même pas.
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Étudiante en psychologie, amoureuse de l’art, de la vie et des neurosciences, je serai ravie de partager avec vous mes connaissances qui ne changeront pas seulement votre façon de voir les choses mais aussi votre vie de tous les jours.