Allaitement maternel : aspects neurobiologiques et psychologiques
L’allaitement maternel est un mécanisme physiologique des plus naturels qui soient. Bien que relativement faible dans notre société occidentale, l’allaitement reste le moyen le plus sain et équilibré de nourrir son enfant. Vous allez apprendre au travers de cet article tous les aspects neurologiques et psychologiques de l’allaitement que ce soit du point de vue de l’enfant ou de la mère.
Qu’est-ce que l’allaitement maternel ?
L’allaitement maternel est le mode d’alimentation physiologique du nourrisson par sa mère ou par une autre femme, comme les nourrices le font dans d’autres pays pour les enfants abandonnés par exemple. Le plus souvent, le bébé va directement prendre le sein, mais dans certaines de nos sociétés modernes, il se peut que la mère tire son lait pour en faire profiter son enfant via un biberon ou une tasse à bec par exemple.
L’allaitement maternel est tout ce qu’il y a de plus naturel et le lait qu’en tire le bébé est optimal pour sa croissance. En plus d’être désaltérant et nourrissant, le lait est riche en hormones, enzymes et facteurs antibactériens, antiviraux et antiparasitaires. Le sein n’est pas seulement la source nutritive de l’enfant, c’est aussi une source importante de bien-être pour le nouveau-né. Il est souvent dit que l’allaitement maternel est la continuité de la grossesse et qu’après le cordon ombilical vient le cordon lacté.
Mécanisme neurobiologique de l’allaitement maternel
Á la fin de la grossesse, afin d’accoucher mais aussi pour produire du lait, le système nerveux central de la mère sécrète des neurohormones via son hypothalamus et son hypophyse comme la prolactine et l’ocytocine.
L’ocytocine est libérée à partir de l’hypophyse postérieure afin de déclencher le processus d’éjection du lait. Dès que l’enfant tète et stimule le sein de sa mère, le réflexe neuro-hormonal se met en place car l’ordre est compris par son système nerveux : il faut activer la production de lait pour satisfaire la demande du bébé. Le cerveau libère donc de la prolactine, pour agir sur les alvéoles du sein et pour activer la production, et de l’ocytocine, pour agir au niveau des pompes afin d’éjecter le lait produit. Dès lors, les canaux et les sinus lactifères s’élargissent pour favoriser l’écoulement. A cet instant, grâce au réflexe de succion du tout petit, le lait sort des seins afin d’être recueilli.
Aspects neurobiologiques de l’allaitement maternel du point de vue de la mère
Du point de vue de la mère, la neurobiologie de l’allaitement maternel est surtout relative à ces deux mêmes hormones : l’ocytocine et la prolactine. En plus de permettre la sécrétion du lait, cette l’ocytocine a de multiples effets sur le psychisme et le corps de la mère. Outre les modifications corporelles qu’elle apporte comme la diminue de la tension artérielle, elle a d’autres atouts.
De façon générale, cette neurohormone entraine un climat de détente qui permet à la mère de se reposer pendant les tétées mais aussi d’être plus attentive aux besoins de son enfant car le taux de cortisol (hormone du stress) diminue en même temps que l’ocytocine est produite.
L’ocytocine sécrétée va aussi stimuler la production d’opioïdes naturels, ce qui engendre une sensation de bien-être et abaisse le seuil de douleur ressentie.
Au niveau du rythme circadien, l’ocytocine et la prolactine permettent à la mère de tomber plus rapidement dans un sommeil profond et réparateur que si leur enfant étaient nourris au biberon. Elles dorment aussi 20 minutes de plus en moyenne.
Aspects neurobiologiques de l’allaitement maternel du point de vue de l’enfant
Tout d’abord, afin de permettre l’allaitement, l’enfant est doté d’un réflexe archaïque dit de succion. Ce réflexe se développe in utero entre la 20e et la 22e semaine de grossesse, lorsque la maturation de son tronc cérébral le permet. Une fois né, le lait maternel va fournir le carburant nécessaire au cerveau de l’enfant pour qu’il continue de se développer à plein régime.
Comme vu précédemment, des neurohormones circulent chez la mère et celles-ci vont être transmises à l’enfant lors de l’allaitement. Le fait que l’ocytocine soit envoyée à l’enfant explique donc le fait que le moment de la tétée soit calme pour les deux et propice au développement de leur relation.
Il y aussi la mélatonine, l’hormone du sommeil, qui est transmise et elle l’est d’autant plus en soirée et la nuit car son taux augmente dans le lait maternel. Le bébé allaité comprendra donc rapidement que la nuit, il faut dormir, car l’information neuro-hormonale a été envoyé au bébé.
Aussi, il faut savoir que le fait d’allaiter un enfant lui permet de se développer de façon optimale en tant qu’être humain. Au niveau de la maturation cérébrale, il a été observé que les QI des enfants allaités était en moyenne plus haut que ceux qui ne l’avaient pas été. Ce nombre est d’autant plus haut que les enfants ont été allaités longtemps. Une autre étude faite aux Etats-Unis chez les enfants prématurés montre que cette différence de points de QI est encore plus importante.
Les performances motrices et visuelles sont elles aussi plus élevées en cas d’allaitement. Cela serait due à la richesse de certains nutriments qui assure la maturité de la rétine et du cortex cérébral.
Aspects psychologiques de l’allaitement maternel chez la mère : comportement d’attachement et de protection
La professeure Uvnas Moberg a beaucoup travaillé sur les comportements maternels et de ses études, elle aurait retiré que, pendant l’allaitement, l’ocytocine relâchée favorise le comportement maternel de protection. Plus il y aurait d’ocytocine en circulation dans le corps de la mère, et plus elle serait agressive en cas de danger. Cela est aussi en partie dû à son anxiété moindre, Neumann dira que « l’agressivité est une chose, mais si vous devez attaquer un animal plus gros, vous devez également réduire votre niveau d’anxiété ».
Un autre comportement favorisé par l’ocytocine est l’attachement entre une mère et son enfant, et à chaque tétée, entre le moment de câlin et les hormones sécrétées, ce lien s’intensifie. En parallèle, cela développe chez la mère une intuition par rapport aux besoins de son bébé et cet effet est multiplié par la durée de l’allaitement. Une mère allaitante, de par sa proximité et grâce à son cerveau boosté en ocytocine, répondra donc plus favorablement aux cris de son enfant.
Aspects psychologiques de l’allaitement maternel chez l’enfant : réconfort et sociabilité
L’interaction mère-enfant et leur contact physique régulier est un cercle vertueux de renforcement de bien être psychologique pour les deux. La mère étant détendue et heureuse au contact de son enfant, lui transmet ses émotions et ainsi de suite. Dès lors, les bases d’un psychisme sain sont posées pour l’enfant.
Dans une étude, il a été démontré que l’allaitement maternel a un impact sur la sociabilité de l’enfant. Lorsque de l’ocytocine était administrée, cela augmentait la probabilité que des personnes regardent leurs interlocuteurs dans les yeux. Le regard était le contact social principal, cela joue sur le lien tissé et la sociabilité de l’enfant de façon générale.
Une étude australienne s’est penchée sur le devenir des enfants allaités d’un point de vue de leur développement psychologique. Les résultats montrent qu’à partir du moment où l’allaitement maternel durait plus de 6 mois, la corrélation entre le nombre de soucis psychologiques et la durée de l’allaitement était négative. C’est à dire que plus l’allaitement était long et moins les adolescents avaient de scores bas sur les questionnaires quantifiant leurs états émotionnels. Ils ont tenté d’expliquer ces résultats avec d’autres expériences et le fait d’avoir un contact physique régulier avec leur mère renforçait le lien de sécurité de l’enfant.
Des études sur les types d’attachements, définis par Bowlby, ont mis en évidence que l’allaitement maternel amenait plus souvent les enfants à avoir un attachement de type « sécure », concrètement cela veut dire qu’au retour de leur mère, ils sont souriants au lieu d’être perturbés ou en colère par exemple.
L’allaitement maternel du point de vue la psychologie sociale
Le fait que l’allaitement soit nécessaire à la survie de l’espèce tout en étant sensible aux modes en fait un sujet intéressant à étudier du point de vue de la psychologie sociale. Pour comprendre simplement ce qu’est une représentation sociale, c’est le jugement et valeur que l’on se fait d’un objet social. Un objet social peut être tout et n’importe quoi et en l’occurrence, c’est l’allaitement, le sein et la maternité.
Les symboliques du sein et les représentations de l’allaitement maternel que l’on a sont bien différentes selon la société dans laquelle on se trouve, mais aussi selon le groupe auquel on appartient. Si vous êtes une maman entourée de personnes prônant l’allaitement, vous allez plus naturellement vous dirigez vers cette pratique alors que si votre entourage ne vous parle que de biberons pour la naissance de votre enfant, vous irez de ce côté par défaut.
Bien que le geste d’allaiter soit reconnu comme naturel, le recours aux nourrices est fréquent depuis des temps ancestraux. Il l’était d’autant plus pour les femmes de hautes lignées, que ce soit pour les pharaonnes ou les reines du moyen âge. Elles ne devaient pas se rabaisser à cette soi-disant servitude car leur niveau social les plaçait au-dessus de cet acte animal. Les représentations sociales de l’allaitement étaient dès lors bien ancrées par rapport au statut social et économique.
Plus récemment, les lobbys féministes ont repris ce terme de servitude et ont prôné le biberon pour se libérer de l’emprise patriarcale. Les hommes, pouvant ainsi nourrir eux aussi leurs enfants, laissaient alors les femmes libres de travailler et d’occuper leurs temps comme bon leur semble. Par-dessus, l’industrie laitière en a profité pour s’affilier aux maternités et promouvoir le lait en poudre sans se préoccuper des dommages pour les bébés.
Les représentations des sociétés modernes occidentales par rapport à l’allaitement maternel sont le résultat de toutes ces anciennes valeurs, l’idée que les mères se perdent corps et âme dans la maternité au profit de la croissance de leurs enfants est une croyance sociale tenace.
Par contre au niveau des religions, l’allaitement a toujours été soutenu comme le moyen plus naturel de nourrir son enfant. Dans le Coran, il est même précisé que la mère allaitera durant deux années complètes. Les représentations sociales et religieuses de l’allaitement sont donc plus versées du côté naturel même si c’est aussi une culture spécifique.
Dans d’autres pays ou dans certains groupes éthniques comme au Kenya par exemple, l’allaitement est vu bien différemment. Il a été compris que l’enfant tétait non seulement pour se nourrir et s’hydrater, mais aussi pour se rassurer, se détendre et être proche de sa mère. Les enfants sont donc régulièrement mis au sein et ils ne pleurent donc quasiment pas.
Pour conclure sur cette parenthèse de psychologie sociale, Matthew Grieco qui a étudié l’allaitement en Europe sur quatre siècles énonce le fait que cette pratique n’est pas plus naturelle que culturelle. L’allaitement est donc conditionné par le contexte social, économique et culturel et l’on peut élargir ça au monde entier.
Merci beaucoup d’avoir cet article sur l’allaitement maternel , ’espère qu’il vous aura plu. Si vous avez la moindre question, je vous invite à la rédiger et j’y répondrai avec plaisir.
Etudiante en psychologie à l’université de Nice, je suis passionnée par mes études mais aussi par les sciences, les arts et le monde en général. J’accorde beaucoup d’importance au fait d’être le plus complète et juste possible, c’est pourquoi je me noie dans le sujet afin de vous proposer des articles de qualités, avec un grand angle critique.